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《三個火槍手》中法對照5

  - Monsieur, dit Aramis parodiant Jussac, ce serait avec un grand plaisir que nous obéirions à votre gracieuse invitation si cela dépendait de nous ; mais malheureusement la chose est impossible : M. de Tréville nous l'a défendu. Passez donc votre chemin, c'est ce que vous avez de mieux à faire.

  Cette raillerie exaspéra Jussac.

  - Nous vous chargerons donc, dit-il, si vous désobéissez.

  - Ils sont cinq, dit Athos à demi-voix, et nous ne sommes que trois ; nous serons encore battus, il nous faudra mourir ici, car, je le déclare, je ne reparais pas vaincu devant le capitaine.

  Athos, Porthos et Aramis se rapprochèrent à l'instant les uns des autres pendant que Jussac alignait ses soldats. Ce seul moment suffit à d'Artagnan pour prendre son parti : c'était là un de ces événements qui décident de la vie d'un homme, c'était un choix à faire entre le roi et le cardinal ; ce choix fait, il fallait y persévérer. Se battre, c'est-à-dire désobéir à la loi, c'est-à-dire risquer sa tête, c'est-à-dire se faire d'un seul coup l'ennemi d'un ministre plus puissant que le roi lui-même ; voilà ce qu'entrevit le jeune homme, et disons-le à sa louange, il n'hésita point une seconde. Se tournant donc vers Athos et ses amis :

  - Messieurs, dit-il, je reprendrai, s'il vous plaît, quelque chose à vos paroles. Vous avez dit que vous n'étiez que trois, mais il me semble, à moi, que nous sommes quatre.

  - Mais vous n'êtes pas des nôtres, dit Porthos.

  - C'est vrai, répondit d'Artagnan ; je n'ai pas l'habit, mais j'ai l'âme. Mon coeur est mousquetaire, je le sens bien, monsieur, et cela m'entraîne.

  - Ecartez-vous, jeune homme, cria Jussac, qui sans doute à ses gestes et à l'expression de son visage avait deviné le dessein de d'Artagnan. Vous pouvez vous retirer, nous y consentons. Sauvez votre peau ; allez vite.

  D'Artagnan ne bougea point.

  - Décidément, vous êtes un joli garçon, dit Athos en serrant la main du jeune homme.

  - Allons ! allons ! prenons un parti, reprit Jussac.

  - Voyons, dirent Porthos et Aramis, faisons quelque chose.

  - Monsieur est plein de générosité, dit Athos.

  Mais tous trois pensaient à la jeunesse de d'Artagnan, et redoutaient son inexpérience.

  - Nous ne serions que trois, dont un blessé, plus un enfant, reprit Athos, et l'on n'en dira pas moins que nous étions quatre hommes.

  - Oui, mais reculer ! dit Porthos.

  - C'est difficile, reprit Athos.

  D'Artagnan comprit leur irrésolution.

  - Messieurs, essayez-moi toujours, dit-il, et je vous jure sur l'honneur que je ne veux pas m'en aller d'ici Si nous sommes vaincus.

  - Comment vous appelle-t-on, mon brave ? dit Athos.

  - D'Artagnan, monsieur.

  - Eh bien ! Athos, Porthos, Aramis et d'Artagnan, en avant ! cria Athos.

  - Eh bien ! voyons, messieurs, vous décidez-vous à vous décider ? cria pour la troisième fois Jussac.

  - C'est fait, messieurs, dit Athos.

  - Et quel parti prenez-vous ? demanda Jussac.

  - Nous allons avoir l'honneur de vous charger, répondit Aramis en levant son chapeau d'une main et tirant son épée de l'autre.

  - Ah ! vous résistez ! s'écria Jussac.

  - Sangdieu ! cela vous étonne ?

  Et les neuf combattants se précipitèrent les uns sur les autres avec une furie qui n'excluait pas une certaine méthode.

  Athos prit un certain Cahusac, favori du cardinal ; Porthos eut Bicarat, et Aramis se vit en face de deux adversaires.

  Quant à d'Artagnan, il se trouva lancé contre Jussac lui-même.

  Le coeur du jeune Gascon battait à lui briser la poitrine, non pas de peur, Dieu merci, il n'en avait pas l'ombre, mais d'émulation ; il se battait comme un tigre en fureur, tournant dix fois autour de son adversaire, changeant vingt fois ses gardes et son terrain. Jussac était, comme on le disait alors, friand de la lame, et avait fort pratiqué ; cependant, il avait toutes les peines du monde à se défendre contre un adversaire qui, agile et bondissant, s'écartait à tout moment des règles reçues, attaquant de tous côtés à la fois, et tout cela en parant en homme qui a le plus grand respect pour son épiderme.

  Enfin cette lutte finit par faire perdre patience à Jussac. Furieux d'être tenu en échec par celui qu'il avait regardé comme un enfant, il s'échauffa et commença à faire des fautes. D'Artagnan, qui, à défaut de la pratique, avait une profonde théorie, redoubla d'agilité. Jussac, voulant en finir, porta un coup terrible à son adversaire en se fendant à fond ; mais celui-ci para prime, et tandis que Jussac se relevait, se glissant comme un serpent sous son fer, il lui passa son épée au travers du corps. Jussac tomba comme une masse. [1][2][3][4][5]

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